Emotional Creature

Emotional Creature

On a tendance à oublier une chose lorsqu’il est question de « viralité » : ça ne dure jamais bien longtemps. Beach Bunny, le groupe indie rock de Chicago formé par Lili Trifilio, a explosé sur TikTok quand ses chansons « Prom Queen » et « Cloud 9 » (cette dernière provenant de leur premier album, Honeymoon, paru en 2020) ont commencé à y être partagées. Sauf qu’on a ici affaire à des artistes pop menés par une autrice-compositrice-interprète dotée d’un indéniable talent pour pondre des hooks. Pour ce deuxième projet, Beach Bunny a misé le tout pour le tout avec des pièces qui laisseront une marque plus permanente. Produit par Sean O’Keefe, qui a travaillé avec Fall Out Boy, Emotional Creature est entièrement consacré aux « expériences émotionnelles ». « On les aborde honnêtement, qu’elles soient positives et émancipatrices ou source de honte. Le fil d’Ariane, c’est notre façon, en tant qu’êtres humains, de ressentir ce qui nous arrive », a confié Trifilio à Apple Music. La manière dont nos relations sociales influencent ces émotions est aussi abordée. On constate cette orientation sur des chansons comme « Entropy », une pièce pop digne de Disney au tournant du millénaire, « Fire Escape », qui raconte les frissons qu’on ressent quand on a un kick, ou encore dans les méandres de synthés prog évoquant la science-fiction de « Gravity » et « Scream ». « J’espère que les gens vont s’y reconnaître », a dit l’artiste au sujet de ce projet, « et peut-être même que l’album servira de catharsis pour les personnes qui vivent les mêmes choses que moi. La musique est le meilleur des remèdes quand on trouve la bonne chanson pour la bonne émotion. » Ici, Lili Trifilio offre à Apple Music un survol pièce par pièce d’Emotional Creature. Entropy « Les Jonas Brothers ont cette chanson qui s’appelle “Burnin’ Up”. Elle commence avec un genre de transition en “fade in” que je trouve assez cool. La pièce a un son typique de la fin des années 90 et du début des années 2000. Sans les imiter, je voulais recréer la “vibe” des gros noms de ces années-là, que ce soit Kelly Clarkson, Avril [Lavigne] ou d’autres. C’est ce qui m’a inspirée; j’avais envie d’essayer différents trucs pour voir ce qui marche et colle avec cette “vibe”-là. » Oxygen « J’ai volontairement tout fait pour démarquer les couplets et les refrains; je voulais que les couplets aient un côté anxiogène, et pas juste en ce qui concerne les paroles. Je souhaitais que le riff de guitare soit un peu plus chaotique. C’est dans les refrains que la chanson prend tout son sens et que les réflexions soulevées par le texte forment un tout. C’est là qu’on se dit : “OK, tout va bien, stresse pas.” Ça m’a pris du temps pour écrire ça parce que c’est assez touffu. C’est un long poème que je notais dans mon téléphone. Quand j’ai finalement trouvé le fil conducteur, je me suis dit que ça ferait une bonne chanson. C’est enfin devenu un truc qu’on pouvait inclure sur l’album et pas juste une interminable diarrhée de mots. » Deadweight « Je pense que “Deadweight” est la suite de quelques chansons sur Honeymoon. Son écriture remonte à 2019 et je me sentais très passionnée. J’ai composé ça super vite, en dix minutes : c’était une façon d’extérioriser les émotions qui ressortaient pendant ma thérapie. Sauf que je ne savais pas comment la conclure. Je remettais toujours ça à plus tard, jusqu’à ce qu’on se retrouve en studio et que j’avoue que je n’avais pas trouvé la fin. Ça me fait un peu penser à du Vampire Weekend. Anecdote concernant le Midwest : il y a une ville qui s’appelle Wisconsin Dells où il y a plusieurs parcs aquatiques plutôt chaotiques. C’est super “cheesy”, et en plus ils adorent le fromage. C’est vraiment un endroit bizarre… Tous les parcs d’attractions et les hôtels qui y sont rattachés ont une chanson thème super weird, et quand on a réécouté “Deadweight”, on s’est tous dit : “Mon Dieu, ça ressemble tellement à la chanson thème du Kalahari Resort!” » Gone « C’est quand je vis quelque chose de vraiment intense que j’écris le mieux. Tu sais, le genre de moment où au lieu de me tourner vers mon journal intime ou ma mère, je me dis : “Je vais essayer d’écrire une chanson là-dessus.” Le reste du temps, mes paroles viennent surtout de notes regroupées en catégories sur mon téléphone. Je voulais que cette chanson-là soit agressive, mais simple. C’est une pièce punk, rien de plus. J’aime que les accords soient un peu dissonants. Le texte, lui, parle de ne pas avoir comment se sortir d’une situation dans laquelle on se sent coincé·e. » Eventually « Là-dessus, je raconte comment le fait de trouver l’amour ou d’être entourée de gens qui m’aiment peut vraiment aider dans les moments de grande anxiété. Je pense que j’ai pondu ça juste après une crise d’angoisse et je me suis dit : “Je ne sais pas vraiment à qui en parler, mais j’ai l’impression que j’ai besoin de sortir ça de mon système et d’y réfléchir d’une manière ou d’une autre.” Elle a un petit côté doux-amer, comme si un courant de tristesse la traversait. » Fire Escape « J’étais super excitée parce que je partais en voyage avec mon copain quelques semaines plus tard. On était dans une relation à distance et j’avais vraiment besoin de passer du temps avec lui, alors j’ai écrit ça en m’imaginant comment ça serait. J’ai ajouté quelques phrases au texte après notre escapade pour que ça reflète bien ce qu’on avait vécu. J’ai toujours adoré New York, ce qui est amusant, dans un sens, parce que Chicago ressemble beaucoup à New York. Je veux dire, c’est pas comme si j’avais besoin d’une immense période d’adaptation quand je vais là-bas, mais cette ville a quand même un côté magique et mystique. Les choses allaient un peu mieux dans ma vie à ce moment-là et j’avais envie d’écrire quelque chose de joyeux. » Weeds « “Weeds” est une des premières pièces que j’ai composées pour cet album. C’est une de mes préférées parce qu’elle casse avec le ton des autres chansons de séparation que j’ai écrites. Dans mes autres textes, je me rabaisse, mais dans celui-là, je suis ma meilleure amie. C’est presque comme si je participais à ma propre intervention. Musicalement, j’ai pris plusieurs risques en expérimentant avec des synthés et d’autres trucs qu’on n’entend pas habituellement dans les pièces de Beach Bunny. » Gravity « La majeure partie de cet interlude a été improvisée. Sean m’a dit : “T’es sûre que tu veux faire ça? OK, parfait! Nous on va aller chez Starbucks, pendant ce temps-là. On revient dans pas long. Vas-y, travaille sur ton truc.” Le thème de l’album est un genre d’hommage à la science-fiction démodée – dans ma tête, en tout cas – et ça, c’est la trame sonore. » Scream « Il n’y a aucun doute que “Scream” a été la plus difficile à écrire. C’était dur de jammer dessus. D’habitude, quand je présente une nouvelle chanson aux membres du groupe, on procède par essais et erreurs. Ils trouvent la “vibe” que je cherche et on sait dans quelle direction la musique doit aller. En général c’est assez facile, mais avec “Scream”, je ne sais pas trop pourquoi, on avait l’impression d’être complètement déconnecté·es. Elle est si différente des autres pièces de Beach Bunny qu’on a eu de la difficulté à bien la cerner. Les autres voyaient que j’étais de plus en plus frustrée, alors ils sont partis en me laissant avec tous les synthés et j’ai essayé plein de trucs jusqu’à ce que ça clique. Je ne me souviens pas combien de temps ç’a pris, mais je sais que quand elle a été finie, tout le monde était épuisé et heureux que ce soit enfin terminé. » Infinity Room « Y a cet artiste britannique qui s’appelle Tom Rosenthal. Ses chansons me font tout le temps pleurer. Il écrit des pièces acoustiques vraiment touchantes et c’est un parolier hallucinant. Dans l’une d’elles, il a échantillonné des chants d’oiseaux et ça m’a complètement renversée. J’ai pondu cette chanson bien avant d’aller en studio et je savais que je voulais y inclure des sons d’oiseaux. Je ne savais même pas comment ou si ça sonnerait bizarre, mais je voulais le suggérer aux autres et voir ce qu’ils en pensaient. Ç’a super bien marché, en fin de compte. “Infinity Room” me donne l’impression d’être dans une serre. Elle a une “vibe” très “nature”. Même le texte a quelque chose d’aérien. » Karaoke « “Karaoke” a été écrite au début de la pandémie ou juste avant. Pour moi, elle parle tout simplement d’avoir un kick. Le texte n’est pas ce qu’il y a de plus songé, mais il reflète bien cette légèreté qu’on ressent quand on a une connexion avec quelqu’un de cool. Musicalement, c’est une des chansons les plus relax de l’album. » Love Song « Aussitôt que j’ai fini d’écrire celle-là, je me suis dit : “OK, l’album va finir sur une note positive.” C’est juste une jolie chanson d’amour et c’est exactement ce que je voulais. C’est un point culminant où tous les thèmes sont finalement réunis. “Love Song” est un peu comme une réflexion sur les moments plus difficiles [d’une relation de couple] où l’amour triomphe et tout est bien qui finit bien. »

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