The Sun And Her Scorch

The Sun And Her Scorch

Après avoir sorti le bien nommé Baby Teeth en 2018, les membres de Dizzy ont dû rapidement gagner en maturité. Avec ce premier album, le quatuor indie pop originaire d’Oshawa, dans la banlieue est de Toronto, se voit ainsi propulsé dans la cour des grands. En un an, le groupe part en tournée avec Death Cab for Cutie, assure des festivals des deux côtés de l’Atlantique et va jusqu’à monter sur le podium des Juno Awards de 2019, où il remporte le prix pour l’Album alternatif de l’année. Pour autant, quand ils s’installent dans un cottage proche de Sudbury, en Ontario, et commencent à écrire leur deuxième album, ils savent qu’ils ne pourront pas reprendre la même recette. Finies, les réminiscences adolescentes mélancoliques, enveloppées dans des sérénades marquetées de synthétiseurs : « J’avais écrit la majeure partie de Baby Teeth pendant mon adolescence, vers l’époque où j’allais finir le lycée », précise la chanteuse Katie Munshaw à Apple Music. « Alors que sur cet album, j’ai la vingtaine et je ne pense plus au mec qui m’a brisé le cœur au lycée. Et quand on ne pense plus à la souffrance amoureuse, il reste plein de choses qui nous tourmentent : la santé mentale, la peur de vieillir, la peur de mourir, devoir dire au revoir à des amis – il y a tout un monde qui s’est ouvert à moi en termes d’écriture. » C’est avec audace et franchise que The Sun and Her Scorch se confronte à ces thèmes. On entend ainsi dans leur album l’influence d’artistes comme Phoebe Bridgers ou The National, à l’époque de I Am Easy to Find. Ce sont « des artistes qui arrivent à marier des instruments acoustiques et électroniques en un ensemble cohérent », admire Munshaw. Une influence qu’on entend dans cette œuvre à mi-chemin entre les textures scintillantes de la dream pop des années 90 et les refrains ciselés des hits actuels, où les confessions et la détresse de Munshaw se parent d’une aura euphorique, oscillant entre réalisme et fantastique. Elle nous dévoile ici un aperçu de son état d’esprit, titre après titre. Worms « Je considère “Worms” [vers de terre] comme une sorte de thème de l’album : c’est comme une main sortie des entrailles de la Terre pour aller chercher la personne qui écoute, l’attraper et la ramener dans le monde de The Sun and Her Scorch. Pour moi, “Worms” évoque ce sentiment d’être sous terre, d’être enfermée et de suffoquer. » Sunflower « “Sunflower”, c’est un peu le cousin de “Worms”. C’était la première fois que je m’attaquais vraiment à ce sentiment d’être sous terre, et c’est une chanson qui fait écho à cette sensation-là, ce que je trouve super cool. Je trouve que même si c’est un titre assez triste et vulnérable à certains endroits, on ressent aussi une force, car c’est un peu ce moment où je me rends compte que j’ai peut-être besoin de changer certaines choses dans ma vie. » Good and Right « J’ai eu l’idée du début des paroles [“How do you think you'll die/I ask you point-blank on a Tuesday night (Comment penses-tu que tu vas mourir/T’ai je demandé un mardi soir, sans prévenir)”] un jour où j’allais au boulot à pied. C’est resté longtemps dans mes mémos vocaux, et puis on l’a mis sur une démo qu’avait enregistré Charlie [Spencer, le batteur]. C’est vraiment magique, ces moments où deux personnes dans le groupe ont chacun une idée, séparément, qui se marie parfaitement avec celle de l’autre. Ça fait partie des choses que j’ai découvertes récemment, ma capacité à écrire sur la mort – qui est aussi un truc qui me terrifie constamment – et sur le fait de vieillir, deux choses qu’on retrouve parfaitement dans cette chanson. Ça parle aussi de la peur de l’inconnu. J’ai pas eu d’éducation religieuse, alors là-dedans je me demande un peu ce qu’il y a après tout ça. » The Magician « À la base, c’était une démo de Charlie. Quand je l’ai écoutée, j’ai tout de suite adoré et j’ai écrit les paroles dans la foulée. J’étais en mode : “T’es interdit de studio jusqu’à nouvel ordre !” C’était vraiment sympa à écrire – je crois qu’on n’avait jamais eu de titre aussi pop avant ça. On s’est vraiment concentré sur le pont, et c’est là qu’on a eu l’idée de la partie “meet me at midnight”. Les ponts, c’est un peu ma bête noire, avec les deuxièmes couplets. C’est dur à réussir, mais une fois qu’on a un bon pont, ça donne une nouvelle dimension à la chanson et ça permet de franchir un cap. Mais le vrai sujet de ce titre, c’est le décès d’une de mes amies – ça parle du deuil, de ce désir de la ramener magiquement à la vie, et d’espérer bêtement qu’elle vienne me voir en concert. C’est le deuil, dans tout ce qu’il a de plus innocent. » Beatrice « “Beatrice”, c’est le nom d’une rue à Oshawa, mais la chanson est avant tout une pure fiction. On l’a écrite très tôt, à l’époque où j’essayais encore d’écrire des chansons d’amour sur les ruptures, et ça donnait quelque chose d’assez forcé. Pour sortir de l’impasse, il a fallu que j’aille puiser dans les relations de gens qui m’entouraient. Ma meilleure amie venait de rompre, mes parents étaient en train de se séparer, du coup je me suis un peu inspirée de toutes ces expériences-là. Donc cette chanson mélange un peu des éléments de ces deux relations qui ont échoué. » Roman Candles « J’ai pas mal d’amis qui sont allés à la fac, qui ont des emplois de bureau aujourd’hui, et qui commencent à acheter des maisons et à avoir des enfants. Pour moi, c’est très bizarre parce que je suis très loin de tout ça. Parfois, je me sens assez nerveuse et j’ai peur d’avoir fait une erreur en faisant carrière dans la musique. C’est de ça que parle cette chanson. J’ai un peu l’impression d’avoir raté le coche. Je trouve que les gens ont du mal à imaginer qu’on puisse faire carrière dans la musique sans être célèbre. À moins d’être Dua Lipa, les gens s’inquiètent pour vous. Ils se rendent pas compte que c’est une vraie possibilité de carrière. Je me sens parfois un peu déconnectée du reste des gens, surtout dans la mesure où j’ai pas à aller dans un bureau tous les matins. À Noël, ça peut être un peu gênant. “Ah, tu fais toujours de la musique, hein ?” “Eh oui papi !” » Lefty « C’est une chanson sur le fait d’être trop fusionnel avec son ou sa partenaire. On a trouvé l’intro sur Internet. On entend quelqu’un changer de chaîne, mais en fait c’est le même gars qui parle, il fait juste tous les personnages, un pour chaque chaîne. Je me suis dit que ça représentait bien les différentes personnalités que je pouvais avoir dans une relation. C’est vraiment devenu la norme de se dire : “Si je rencontre pas le prince charmant, je vais mourir”, avec l’idée que tout ça est très romantique, alors qu’en fait c’est complètement fou et irréaliste. » Primrose Hill « C’était quand on était en tournée à Londres. On soir où on jouait pas, on est sorti avec un ami qui joue dans un groupe londonien. On a beaucoup bu, j’ai pris quelques verres de trop et ce soir-là j’ai dit pas mal de trucs que j’ai regrettés le lendemain. Donc c’est une chanson qui parle de cette culpabilité, de ce remords, quand on est aussi méchant avec les gens qu’on aime mais qu’ils continuent à nous aimer malgré tout. C’est le sujet du pont avec les voix modulées vers les graves : “Anywhere you go, I'll be there to dote [où que tu ailles, je serai là pour approuver]”, c’est un peu comme si cette personne qui nous aime nous disait : “C’est bon”, et acceptait nos excuses. » Daylight Savings Time « C’est une chanson qui parle de la dépression. On pense parfois que c’est éphémère, et puis l’année passe, l’été revient, et on se rend compte qu’en fait c’était peut-être pas éphémère, que c’est peut-être plus profond que ça. » Ten « “Ten” parle d’être amoureuse de quelqu’un et de se rendre compte que tout le monde finit par mourir – on peut vieillir avec quelqu’un, partager une longue et belle vie avec cette personne, mais au bout du compte on meurt toujours seul. Dans la chanson, j’utilise l’expression “the sun and her scorch” [le soleil et sa brûlure] assez littéralement, pour parler du vrai soleil et de sa chaleur. Mais dans le contexte de l’album, c’est une bonne métaphore de moi-même, de ma façon d’être méchante ou de faire mal aux autres de plein de manières différentes. Je me rends compte que toutes les chansons de l’album me montrent en train de combattre ces schémas que je reproduis et que je ne supporte plus. » Worms II « Au début, “Worms” était censé être un seul titre, et puis on a décidé de le couper en deux. Ça faisait un peu générique de fin de terminer l’album là-dessus. »

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